Émancipation


Tendance intersyndicale

Un mois dans le monde

Pompiers

Avec le changement climatique en cours, les canicules ou les inondations vont être de plus en plus fréquentes. Voilà qui devrait paniquer même les riches. La Californie connaît des incendies de plus en plus catastrophiques. Celui de la dernière semaine d’octobre a ravagé plus de 70 000 hectares. Débordés, les pompiers ont vu apparaître à leur côté des “pompiers privés”. Très bien équipés et payés, ceux-ci sont envoyés par les compagnies d’assurance pour protéger les maisons des riches qui ont souscrit un juteux contrat d’assurance. Quand il n’y a pas d’incendie, ils nettoient les sous-bois mais seulement autour des maisons des assuré·es. Les pauvres peuvent brûler, les riches survivront. Le “meilleur du monde” n’est pas pour demain, il est déjà là.

Bolivie

Certes, Evo Morales avait déçu sa base sociale. Ses grandes réussites auront été de sortir une partie notable de la société de la pauvreté et de rendre à la population indigène sa dignité. Mais il s’était accommodé avec les grandes entreprises qui pillent le sous-sol et il s’accrochait au pouvoir malgré un référendum perdu. Toutes ces critiques relèvent maintenant de l’histoire ancienne. Ce qui s’est passé à La Paz ressemble à toute la tradition des coups d’État fascistes que l’Amérique Latine a connus. Brutalité extrême de la police et de l’armée, destruction de toutes les formes de pouvoir liées à l’ancien président, arrestations par milliers, exécutions extrajudiciaires. S’y ajoute le fait que la présidente installée par les putschistes, Jeanine Anez, a prêté serment en déclarant que “Dieu a permis que la Bible retourne au Palais”. Cette évangéliste (immédiatement reconnue présidente par les États-Unis) est une raciste de la pire espèce : “Je rêve d’une Bolivie débarrassée des rites sataniques indigènes, la ville n’est pas faite pour les Indiens …”.

On espérait, avec la victoire péroniste en Argentine, la libération de Lula ou les manifestations sociales monstres au Chili et à présent en Colombie, que la vague brune qui envahissait l’Amérique Latine était enrayée. Le coup d’État de La Paz montre l’inverse.

Trump

Il ne faut pas céder à la facilité de se moquer de ce personnage brutal, graveleux et profondément stupide. Il est en train, patiemment, de détruire la coquille consensuelle bricolée à l’issue de la seconde guerre mondiale (promotion du multilatéralisme, système complexe onusien, élaboration d’un “droit international”), laissant voir le visage brutal et décomplexé de la phase actuelle du monde capitaliste. Il instaure, à l’intérieur de son pays comme à l’extérieur, la loi du plus fort et le fait accompli. Il est certes en difficulté. La procédure d’“impeachment” lancée par les démocrates met à nu des méthodes de voyou à côté desquelles Nixon, poussé à la démission, apparaît comme un saint. Des élections partielles dans ses fiefs de Virginie ou de Louisiane montrent que la fidélité de son électorat traditionnel de petits blancs ne suffit plus. Mais rien n’indique qu’il est sûr de perdre aux élections de novembre 2020. L’entrée en lice dans le camp démocrate du milliardaire Michael Bloomberg pour barrer la route à la gauche (Sanders, Warren) montre que l’establishment démocrate est prêt à rééditer la stratégie qui avait fait élire Trump. Si ce sinistre personnage devrait être battu, ce sera plus probablement avec le retour de la lutte des classes. Les 48 000 ouvrier·ères de General Motors ont fait une grève de 40 jours et obtenu une hausse substantielle des salaires. Par contre ils/elles n’ont pas pu empêcher la fermeture de trois usines.

Haïti

Tous les jours, les quartiers populaires descendent dans la rue pour exiger la démission du président Jovenel Moïse qui a détourné à son profit les aides qui arrivent de l’étranger (environ trois milliards de dollars). Pour échapper à la colère populaire et à la justice, les hommes du pouvoir ont scellé un accord avec la pègre. Dans ce pacte mafieux, la police est aidée par des groupes paramilitaires liés à la mafia pour réprimer les manifestations. La pègre multiplie les assassinats et terrorise la population.

Israël/Palestine

Depuis des décennies, la méthode a été utilisée par tous les politiciens véreux israéliens : Pérès, Sharon, Olmert et à présent Netanyahou. “Je suis en difficulté sur le plan intérieur ? Pas de problème, je déclenche une exécution extrajudiciaire, des bombardements, une invasion, une guerre… L’unité nationale se réalise aussitôt et je suis sauvé”. C’est comme cela qu’il faut interpréter l’exécution extrajudiciaire d’un chef militaire du Jihad Islamique à Gaza (l’armée israélienne ne s’est pas embarrassée des “dommages collatéraux” ; huit membres de la famille Sawarkeh dont deux femmes et cinq enfants ont été “éliminé·es” lors du bombardement de leur maison le 14 novembre). Comme prévu, le Jihad a riposté. Et Gaza a connu un nouveau déluge de bombes. 36 mort·es. La routine.

Au moment où Trump piétine allègrement ce qui est censé s’appeler le droit international en affirmant la “légalité” des colonies israéliennes, la France et l’Union Européenne avaient une occasion de se démarquer. Perdu ! Alors que des immeubles étaient pulvérisés à Gaza, il y a eu un communiqué français… pour dénoncer les roquettes parties de l’enclave assiégée en guise de riposte. Dégueulasse !

Comme prévu, Netanyahou a reçu le soutien de son opposant Ganz pour sa politique à Gaza ou pour le nouvel emprisonnement de la députée Khalida Jarrar, membre du FPLP. Il s’agit d’une “détention administrative”, donc il n’y a ni prétexte, ni procès. Dans les prisons israéliennes, on n’est pas soigné et on meurt. Sami Abu Diak avait 36 ans et luttait contre un cancer depuis cinq ans sans médicaments ni traitement. Il est le 222ème prisonnier politique palestinien mort en prison depuis 1967.

Certain·es se féliciteront que la prison se rapproche de Netanyahou ou qu’Israël soit momentanément ingouvernable. Pas de joie prématurée : le “centriste” Ganz qui propose à présent à Netanyahou une alternance au pouvoir est aussi un criminel de guerre.

Iran

Les témoignages manquent sur le massacre en cours. Un formidable mouvement social est né de l’augmentation du prix des carburants. En fait, la colère est généralisée avec l’explosion de la pauvreté, les pénuries nées de la rupture de l’accord sur le nucléaire iranien provoquée par Trump, la brutalité du régime (les lourdes peines de prison se multiplient, notamment pour les femmes qui refusent de porter le voile) et la corruption généralisée. Le régime a coupé Internet pour pouvoir réprimer à huis clos. Le 15 novembre, Amnesty International parlait de 145 mort·es avéré·es et probablement beaucoup plus.

Liban

Des membres du Hezbollah et de la milice Amal ont sauvagement attaqué les manifestant·es qui, toutes “communautés” confondues (puisque la “communauté” à laquelle on appartient figure sur les papiers d’identité), manifestent tous les jours contre le “système”, cette alliance de clans confessionnels corrompus qui dirigent le pays. Après son intervention pour sauver la dictature de Assad, le Hezbollah perd cette fois toute la popularité qu’il avait acquise dans sa résistance à l’occupation israélienne.

Pierre Stambul


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